
Le Trinquelin, dans les bois de la Pierre-qui-Vire. Photo : Ishta
ESPRIT & NATURE
Sainte-Marie-de-la-Pierre-qui-Vire, en Morvan, à Saint-Léger-Vauban (Yonne), est une abbaye bénédictine fondée en 1850.
La renommée de l’abbaye est due aux éditions Zodiaque, fondées en 1951 et spécialisées dans l’art roman, dont les volumes ont été conçus et fabriqués à l’imprimerie intégrée à l’abbaye jusqu’au début des années 2000. Durant l’occupation allemande, le monastère a servi de refuge pour toutes les personnes traquées par l’occupant, mais aussi de maquis pour des réfractaires au STO, voire d’appui tactique au maquis Vauban et à son initiateur, Armand Simonnot, dit « commandant Théo ». Aujourd’hui, on y vient de loin pour acheter les fromages de sa ferme convertie à l’agriculture biologique en 1969 !
Un reportage à la Pierre-qui-Vire, en compagnie de l’ami François Ernenwein, le vendredi 28 octobre, me donne l’occasion de revenir sur l’un des développements des mythologies forestières qui ont hanté l’imaginaire occidental depuis l’aube indo-européenne jusqu’aux grands défrichements monastiques de l’apogée du Moyen Âge (la fameuse « Renaissance du XIIe siècle »), en passant par le chaudron chamanique des légendes gauloises et celtiques, la première christianisation des cultes naturalistes païens, le grand cycle arthurien et courtois de la Table ronde, les sermons ou les chants de sainteté de Bernard de Clairvaux et de François d’Assise…
Antoine Peillon
Abbaye de la Pierre-qui-Vire et bois de Saint-Léger-Vauban. Photos : Ishta
Du Cantique des bois de Bernard de Clairvaux
au Cantique des créatures de François d’Assise
Culture sans nature n’est que ruine de l’âme
La sensibilité des chevaliers courtois des XIIe et XIIIe siècles, telle qu’elle est sublimée dans le Conte du Graal (ou Perceval) de Chrétien de Troyes (vers 1180), est l’intériorité d’un imaginaire qui rend le Verbe visible et audible. Cet imaginaire chevaleresque et courtois est désormais, en cette « Renaissance du XIIe siècle », le fondement d’une quête humaine de la sainteté.
Jean-François Lecompte a montré les liens organiques qui unissent Le Perceval, l’œuvre mystique de saint Bernard de Clairvaux et le Cantique des cantiques, dans La Symbolique du Graal. Géométrie du Conte du Graal de Chrétien de Troyes (Edite, 2008).
Cette nouvelle quête de la sainteté doit, dès lors, être rapportée à la conquête de l’immense « désert » forestier occidental par les ermites chrétiens, puis les moines, dès le haut Moyen Âge (IVe – IXe siècles)[i]. La figure centrale de saint Bernard (1090-1153), lui aussi, comme Perceval, d’origine chevaleresque[ii], mais aussi ermite, refondateur d’un ordre monastique (Cîteaux) qui s’est imposé dans tout l’Occident chrétien, organisateur de la deuxième Croisade, parrain spirituel – et sans doute politique – des Templiers, personnalité mystique hors du commun…, en fournit le modèle parfait.
Notons d’emblée son inspiration forestière, telle qu’exprimée par sa correspondance et sa quasi-obsession d’interprétation du Cantique des cantique où l’Esprit voyage si librement, si courtoisement, dans les nombreux commentaires et sermons de Bernard, du règne animal (gazelle, biche…) à la divinité, en passant par l’incandescence d’un amour humain, jamais trop humain, divinement humain[iii].
« Rapportez-vous-en, mon cher ami, à ma propre expérience. On apprend plus de choses dans les bois que dans les livres ; les arbres et les rochers vous enseigneront des choses que vous ne sauriez entendre ailleurs, vous verrez par vous-même qu’on peut tirer du miel des pierres et de l’huile des rochers les plus durs… » (Bernard, « Lettre au maître Henry Murdach »[iv], Epistolae, CVI, 1, 2, c 241D, 242B).
L’enseignement des bois, des arbres et des rochers est, pour Bernard de Clairvaux, la même révélation mystique qu’il déchiffre dans son inlassable lecture du Cantique des cantiques. C’est peu dire qu’il est, en ces premiers temps de « grande scolastique » rationaliste et déjà desséchée, notamment celle d’Abélard[v], le champion de la charité et de l’amour mystique, lequel intègre pleinement le premier degré de l’amour naturel, c’est-à-dire de l’amour charnel. Car « ce n’est pas le spirituel mais le charnel qui commence » (I Cor., XV, 46), se souvient l’abbé de tout l’Occident roman, surnommé « le dernier Père de l’Église »[vi].
D’où la prééminence presque naturaliste de la contemplation, de l’émerveillement et de la louange (amour de la beauté de la nature), dans son approche de Dieu.
Un « sentiment océanique »
Parmi tant d’œuvres merveilleuses (Georges Sand, Jack London, Italo Calvino, Joseph Conrad, Maurice Genevoix, Henri Vincenot…), citons ce livre de Julien Gracq, Au château d’Argol (1938). Tout le légendaire et l’esprit médiéval, courtois et mystique, tout le mythe de mort initiatique et de rédemption y est sublimé. Ce qui est impressionnant, aussi, c’est la résurgence des plus anciennes structures religieuses de l’Occident à la surface du pays qui s’étend au sud du château d’Argol, marquant la permanence spirituelle de la forêt proto-indo-européenne dans notre culture. Dans ce roman de Gracq, la forêt est vivante, aussi, d’une vie élémentaire qui n’est pas animale : l’élément végétal est, par bien des traits, donné aussi comme liquide. Cette forêt est une mer, un océan, un gouffre abyssal dont la couleur, sous le ciel qui lui donne son relief, favorise l’heureuse confusion : « Ces nuages du ciel, blancs et plats, paraissent planer au-dessus du gouffre vert à une énorme hauteur. A regarder cette mer verte, on ressentait un obscur malaise » (Gracq, Au château d’Argol, José Corti, 1938, p. 30). » (…) Pour que l’assimilation mer-forêt fût tout à fait complète, il fallait joindre à cette vue plongeante l’image du bateau perdu dans la tempête : « (…) les oscillations bouleversantes de l’entière masse du château engagé comme un navire en détresse au travers des houles puissantes de la forêt. » (Ibidem, p. 138). »[vii]
Rappelons, pour mémoire, que l’expression « sentiment océanique » apparaît dans une lettre de Romain Rolland à Sigmund Freud, datée du 5 décembre 1927, afin de tenter de définir le mysticisme : « Mais j’aurais aimé à vous voir faire l’analyse du sentiment religieux spontané ou, plus exactement, de la sensation religieuse qui est (…) le fait simple et direct de la sensation de l’éternel (qui peut très bien n’être pas éternel, mais simplement sans bornes perceptibles, et comme océanique). »[viii]
L’esprit de Citeaux
Quand Robert de Molesme (c. 1029 – 1111) fonda Cîteaux en 1098, avant que Bernard ne s’y réfugie en 1112, « les hommes n’avaient pas coutume d’y accéder à cause de l’opacité des bois et des épines ; seules y vivaient les bêtes sauvages… » Le grand médiéviste Georges Duby commente : « La forêt, les buissons, les fondrières isolent le monastère cistercien. Il est exclu qu’un bourg se forme à son ombre. Car il se veut ermitage en même temps que cloître. »[ix]
La remarque fait écho aux épiques Annales de l’abbé Lambert d’Hersfeld (c. 1028 – c. 1085), composées en 1078, qui racontent la marche de moines vers le site de fondation d’une nouvelle abbaye : « Les versants de la montagne étaient plongés dans l’ombre d’une immense forêt qui depuis là se déployait sur des milliers et des milliers de pas, immense et continue… Pendant trois jours (…) ils marchèrent dans cette forêt immense, le long d’un sentier étroit et peu connu qu’avait découvert leur guide, un chasseur, que sa pratique de la chasse rendait habile à s’orienter dans le secret des forêts. »[x]
Claude Clément a visité le site de Clairvaux, afin de donner chair à son œuvre sur saint Bernard le « grand initié ». Il fait une description inspirée de la fondation de Clairvaux dans le Val d’Absinthe : « Josbert conduisit Bernard à peu de distance de sa demeure, dans une vallée perpendiculaire à celle de l’Aube et à l’ouest de cette rivière. Elle était orientée est-ouest, s’ouvrait largement vers l’orient, remontait en pente douce vers l’occident, dans une forêt de haute futaie. (…) Deux falaises calcaires, de faible altitude, bordaient la vallée au nord et au sud, couvertes d’épineux, d’arbres rabougris, de taillis difficilement franchissables et percées de nombreuses grottes. Y vivaient des ermites, à peu près totalement abandonnés si ce n’est par des voleurs et des bandits qui hantaient aussi l’endroit. »[xi]
L’érémitisme forestier de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler « l’esprit de Cîteaux », dont la bible est le Cantique des cantiques[xii], a frappé les contemporains de saint Bernard, comme le dénote sa première biographie, où l’on trouve cette claire description du site de la nouvelle abbaye de Clairvaux, fondée en 1115[xiii] : « Une solitude enfouie au plus épais des forêts et resserrée dans son défilé de collines, où les serviteurs de Dieu vivaient cachés. »[xiv] Cachés en forêt, comme Merlin l’Enchanteur…
Cachés en forêt, pour contempler amoureusement, extatiquement, mystiquement, la Création, car « l’être des choses met en relief une puissance inouïe, tellement sont nombreuses et grandes les créatures, et tellement la Création est diverse et admirable », s’exclame Bernard[xv].
Sous l’ombre protectrice des grands chênes et fayards de la forêt champenoise et bourguignonne, Clairvaux, en sa clairière de lumière, fut l’écrin de pierre du « Chant des chants » d’amour. Il y a une relation organique, radicale, entre le monastère cistercien et la forêt, comme il y a une analogie plus que symbolique entre l’ascèse des frères de Bernard, gravissant un à un les degrés d’amour qui mènent à la contemplation mystique de Dieu, et l’aventure initiatique des chevaliers de la Table ronde sur les sentiers de Brocéliande.
Nul mieux de Georges Duby n’a condensé en quelques lignes cet entrelacs spirituel : « De même que la perfection cistercienne est fruit d’un travail sur soi poussé jusqu’au profond de la chair, et que là prend appui l’effort d’élévation continue, de degré en degré, puisque, en effet, la morale de saint Bernard s’enracine dans une méditation sur l’incarnation, de même le bâtiment cistercien commence à l’écran de sauvagerie que le monastère autour de lui protège. Il a pris corps au sein de cette enveloppe broussailleuse. Il en procède. On ne saurait l’en dissocier. (…) Car pour saisir Fontenay dans ce qui fait son sens et le fort de sa beauté, il faut s’en approcher pas à pas, par les sentes forestières, dans la pluie d’octobre, à travers les ronces et les fondrières – péniblement ; comme il faut péniblement découvrir Sénanque après avoir longtemps trébuché parmi les éboulis de la colline, dans la pleine aridité de juillet. L’œuvre d’art que la prédication bernardine a fait naître débute par la traversée d’un désert, par une épreuve. Cette épreuve que les romans du Graal situent eux aussi, précisément, dans l’étrange, l’inquiétant de la lande, du taillis, tous les enchantements qu’ils recèlent… »[xvi]
François d’Assise, frère universel
Au XIIIe siècle, après Hildegarde de Bingen (1098-1179) et Elisabeth de Schönau (1129-1164), de nombreuses moniales cisterciennes approfondissent la charité cosmique de saint Bernard. Béatrice de Nazareth, dans les Flandres, Yvette de Huy, Ide de Louvain, Gertrude d’Helfta, dite « la Grande », Gertrude et Mechtilde de Hackeborn (1241-1299), Mathilde de Magdebourg (1207-1282) donnent ainsi sa pleine dimension à une tradition mystique dite « nuptiale », qui explique les relations de l’âme avec Dieu en empruntant les images du rapport amoureux, à l’exemple du Cantique des cantiques selon l’exégèse de saint Bernard.[xvii]
Elles suivent aussi la voie du « frère universel », saint François d’Assise (1181-1226)[xviii] dont le premier biographe, Thomas de Celano (c. 1200 – c. 1270, franciscain), raconte : « Quand il rencontrait des fleurs répandues par nappes, il leur prêchait comme si elles avaient été douées de raison et les invitait à louer le Seigneur. Les moissons et les vignes, les rochers et les forêts, tous les sites riants, les fontaines, les bosquets, la terre, le feu, l’air et les vents, tous, avec la plus authentique simplicité, il les exhortait à aimer Dieu et à le servir de grand cœur. Tous recevaient le nom de “frère” ; l’intuition pénétrante de son cœur arrivait à découvrir d’une manière extraordinaire et inconnue d’autrui le mystère des créatures. »[xix]
Comment ne pas citer ici le Cantique des créatures, connu aussi sous le nom de Cantico di Frate Sole en italien (ou Cantique du frère soleil), ce chant composé en dialecte de l’Ombrie par saint François d’Assise en avril ou mai 1225, à San Damiano ?
« Très-Haut, tout-puissant et bon Seigneur, à vous appartiennent les louanges, la gloire et toute bénédiction ; on ne les doit qu’à vous, et nul homme n’est digne de vous nommer.
Loué soit Dieu, mon Seigneur, à cause de toutes les créatures, et singulièrement pour notre frère messire le soleil, qui nous donne le jour et la lumière ! Il est beau et rayonnant d’une grande splendeur, et il rend témoignage de vous, ô mon Dieu !
Loué soyez-vous, mon Seigneur, pour notre sœur la lune et pour les étoiles ! Vous les avez formées dans les cieux, claires et belles.
Loué soyez-vous, mon Seigneur, pour mon frère le vent, pour l’air et le nuage, et la sérénité et tous les temps, quels qu’ils soient ! Car c’est par eux que vous soutenez toutes les créatures.
Loué soit mon Seigneur pour notre sœur l’eau, qui est très utile, humble, précieuse et chaste !
Loué soyez-vous, mon Seigneur, pour notre frère le feu ! Par lui vous illuminez la nuit. Il est beau et agréable à voir, indomptable et fort.
Loué soit mon Seigneur, pour notre mère la terre, qui nous soutient, nous nourrit et qui produit toutes sortes de fruits, les fleurs diaprées et les herbes !… »[xx]
Ivan Gobry a parfaitement saisi que la « joie séraphique (de François d’Assise), débordante et continue, (…) trouve un aliment privilégié dans la nature »[xxi], ce que confirme l’apparence et le comportement initial d’ermite du saint, entre 1206 et 1208[xxii], tandis de Jacques Le Goff, introduisant la belle biographie donnée par Chiara Frugoni, souligne combien le Poverello était nourri de littérature courtoise française, profondément imprégné « d’un amour courtois qui donne des expressions étonnantes aux sentiments de Francesco »[xxiii]…
Érémitisme, c’est-à-dire refuge dans « les montagnes boisées, les grottes des reliefs calcaires et les collines escarpées »[xxiv] de l’Italie centrale du XIIIe siècle ; fraternité naturaliste ; mystique cosmique ; amour courtois… Nous retrouvons bien, dans le destin spirituel de saint François, l’articulation de toutes les étapes et mutations de l’imaginaire forestier occidental, depuis Neptonos jusqu’à saint Bernard, en passant, principalement, par Cernunnos, Merlin, Arthur et Perceval.
Antoine Peillon
La Résistance en Morvan (musée à Saint-Brisson, mémorial de Dun-les-Places…) et l’œuvre de Marcel Vigreux.
L’association Morvan terre de Résistances – Association pour la recherche sur l’Occupation et la Résistance en Morvan / ARORM
La librairie du musée de la Résistance en Morvan et du mémorial de Dun-les-Places
Un livre : L’Esprit du cerf, Éditions Le Bord de l’eau, 2011.
[i] Fabrice Guizard-Duchamp, Les Terres du sauvage dans le monde franc (IVe – IXe siècle), Presse universitaires de Rennes, 2009.
[ii] Il est fils de Tescelin et d’Aleth, seigneurs de Fontaine-Lès-Dijon. Cf. Georges Duby, Saint Bernard. L’art cistercien, Flammarion, collection « Champs », 1979, p. 86 : « Il était né (…) dans un lignage de moyenne noblesse, de la vassalité des ducs de Bourgogne ; ses pères étaient des seigneurs de châteaux, maîtres de la terre et de la puissance sur quelques agglomérations de rustres ; par sa mère, son ascendance atteignait un rang plus élevé, celui des comtes, les héritiers des conducteurs de l’armée franque. Un bon sang donc, le seul à cette époque jugé capable de faire un saint. »
[iii] Bernard de Clairvaux, Qu’il me baise d’un baiser de sa bouche !; Quatre sermons sur le Cantique des cantiques, Editions Allia, 2007. Etienne Gilson, La Théologie mystique de saint Bernard, Vrin, 1934, nouvelle éd., 1986 et 2006. Marie-Dominique Chenu, L’Eveil de la conscience dans la civilisation médiévale, Institut des études médiévales (Montréal) et Vrin (Paris), pp. 33 à 46. Claude Clément, Saint Bernard, ou la puissance d’un grand initié. De la kabbale à la mystique, Fernand Lanore et François Sorlot éditeurs, 1996, pp. 220 à 227 et 262 à 267.
[iv] Henri Murdach tenait école chez les Anglais. Il céda enfin aux exhortations de saint Bernard, se fit religieux de Clairvaux. Il fut le troisième abbé de Wells en Angleterre et succéda, sur le siège archiépiscopal d’York, à Guillaume le Trésorier, déposé par le pape Eugène III.
[v] Marie-Madeleine Davy, Bernard de Clairvaux, Albin Michel, collection « Spiritualités vivantes », 2001, pp. 59 à 66. Pierre Aubé, Saint Bernard de Clairvaux, Fayard, 2003, p. 408.
[vi] De diligendo Deo, VIII, 23, c. 988A. Marie-Madeleine Davy, Bernard de Clairvaux, Albin Michel, collection « Spiritualités vivantes », 2001, p. 158.
[vii] Philippe Barrier, Forêt légendaire, Christian de Bartillat, 1991, pp. 241 et 242.
[viii] Romain Rolland, « Lettre à Sigmund Freud », 5 décembre 1927, dans Un beau visage à tous sens. Choix de lettres de Romain Rolland (1866-1944), Albin Michel, 1967, pp. 264-266. Cf. Michel Hulin, La Mystique sauvage, PUF, collection « Quadrige », 1998, pp. 29 à 44 (« Freud, Romain Rolland et le sentiment océanique »).
[ix] Georges Duby, Saint Bernard. L’art cistercien, Flammarion, collection « Champs », 1979, pp. 72 et 73.
[x] Citée dans Georges Duby, Saint Bernard. L’art cistercien, Flammarion, collection « Champs », 1979, p. 103.
[xi] Claude Clément, Saint Bernard, ou la puissance d’un grand initié. De la kabbale à la mystique, Fernand Lanore et François Sorlot éditeurs, 1996, p. 187.
[xii] Raymond Oursel (dir.), L’Esprit de Cîteaux, Zodiaque, collection « Les Points cardinaux », 1978.
[xiii] En 1115, Étienne Harding, abbé de Cîteaux, envoie Bernard à la tête d’un groupe de moines pour fonder une nouvelle maison cistercienne dans une clairière isolée à une quinzaine de kilomètres de Bar-sur-Aube, le Val d’Absinthe,[] sur une terre donnée par le comte Hugues de Champagne. La fondation est appelée « Claire Vallée » (Clara Vallis), qui devient ensuite « Clairvaux ». Bernard demeure abbé de Clairvaux jusqu’à sa mort en 1153.
[xiv] Guillaume de Saint-Thierry, Vita Bernardi (1145).
[xv] « Troisième sermon pour la Pentecôte », dans Sermons pour l’année, Brépols et les Presses de Taizé, 1990, pp. 567 et 568.
[xvi] Georges Duby, Saint Bernard. L’art cistercien, Flammarion, collection « Champs », 1979, p. 103.
[xvii] Pietro de Leo, « La postérité spirituelle » (de Bernard de Clairvaux), dans Collectif, (Colloque de Lyon-Cîteaux-Dijon) Bernard de Clairvaux. Introduction générale aux œuvres complètes. Histoire, mentalités, spiritualité, Cerf, 2010, Sources chrétiennes n° 380, pp. 667 et 668.
[xviii] Hélène et Jean Bastaire, Le Chant des créatures…, Cerf, 1996, pp. 49 à 51.
[xix] Thomas de Celano, Vita prima, chap. XXIX, 1232, dans Saint François d’Assise, documents rassemblés par Théophile Desbonnets et Damien Voreux, Editions franciscaines, 1981, p. 262.
[xx] Traduction d’Antoine-Frédéric Ozanam, 1852.
[xxi] Saint François d’Assise et l’esprit franciscain, Le Seuil, collection « Maîtres spirituels », 1957, p. 76.
[xxii] André Vauchez, François d’Assise. Entre histoire et mémoire, Fayard, 2009, p. 62.
[xxiii] Chiara Frugoni, Saint François d’Assise. La vie d’un homme, avec une préface de Jacques Le Goff, Noêsis, 1997, p. 13.
[xxiv] André Vauchez, Op. cit., p. 62.
POST-SCRIPTUM POUR LA TOUSSAINT 2022
Le médiéviste Philippe Walter a remarqué que la fête de saint Hubert, le 3 novembre, se situe très précisément dans la période du Samain irlandais (Samonios gaulois, qui deviendra Hallowen et la Toussaint, selon les contextes culturels), le nouvel an celte, période pendant laquelle la « liaison » est permise « entre le monde des humains et le monde féérique », « moment où les êtres de l’Autre Monde ont provisoirement la permission de rendre visite aux vivants, (…) où les vivant peuvent accéder furtivement à l’Autre Monde. »[i] Il en conclut, à juste titre, que « la légende de saint Hubert se présente, en fait, comme la réécriture chrétienne d’un récit maintes fois attesté dans la littérature médiévale d’origine celtique » et qu’« il s’agit de la rencontre d’un humain et d’un animal qui n’est que la métamorphose d’une créature de l’Autre Monde… »
Il souligne : « Dans la légende christianisée de saint Hubert, le cerf-fée est devenu un avatar du Christ. Tout en conservant son don de parole, il peut influencer la destinée de celui qu’il rencontre : en convertissant le pécheur à la vraie foi ou en découvrant au jeune homme innocent les vérités de l’amour. Dans un cas comme dans l’autre, le cerf a joué son rôle d’animal psychopompe ; il a conduit un personnage trop humain vers sa vérité ultime. Il a surtout servi de médiateur entre le monde humain et l’Autre Monde à un moment critique de transition et de passage : Samain. »[ii]
Retenons bien ce schéma initiatique de conversion (metanoïa) du noble ensauvagé qui, comme Hubert, fait pénitence. C’est celui que l’on retrouvera bientôt dans la quête de Perceval, telle que raconté dans le Conte du Graal de Chrétien de Troyes à la fin du XIIe siècle. Et comprenons que l’homme médiéval, chevalier ou chasseur, ne rencontre ou ne poursuit jamais un cerf (ou une biche) en forêt sans craindre (ou espérer) passer à travers le miroir qui sépare le monde d’ici-bas du paradis (ou de l’enfer) des fées…
A. P.
[i] Philippe Walter, Mythologie chrétienne. Fêtes, rites et mythes du Moyen Âge, Imago, 2003, pp. 43, 56 et suivantes.
[ii] Ibidem, p. 57.