« J’ai servi fidèlement le socialisme et la République, qui sont inséparables : car sans la République, le socialisme est impuissant et, sans le socialisme, la République est vide. J’appartiens, vous le savez, à ce grand parti socialiste qui a uni toutes ses forces pour hâter l’émancipation complète des prolétaires et l’avènement d’une société plus harmonieuse et plus juste… »

Jean Jaurès, « Vers la République sociale » (Albi, profession de foi de 1906)

Jaurès et Blum, figures tutélaires du Parti socialiste de Côte-d’Or.

C’est l’extraordinaire Pierre Leroux qui utilise, en 1831, pour la première fois, le mot socialisme dans son sens moderne et s’en attribue même la paternité(La Grève de Samarez, 1857). En mars 1834, le fondateur du socialisme républicain l’emploie dans « De l’individualisme et du socialisme », publié par la Revue encyclopédique. Pierre Leroux définit le « socialisme » comme un « néologisme nécessaire », en l’opposant au concept d’individualisme. Pour lui, le socialisme est directement rattaché à la Révolution française. Il est « la doctrine qui ne sacrifiera aucun des termes de la formule Liberté, Égalité, Fraternité ».

Depuis 1789 !

Un siècle et demi plus tard, l’historien Albert Samuel (Le Socialisme, Chronique sociale, 1994) définit le socialisme comme étant « la recherche raisonnée et active d’un ordre politique qui partage le pouvoir ; d’un ordre économique qui partage équitablement la production et les biens produits ; d’un ordre juridique qui protège les pauvres, et d’une culture qui soit le fruit d’une création commune ». Constance d’une philosophie politique qui me semble plus actuelle que jamais !

L’encyclopédie en ligne Wikipédia résume : « Le socialisme, en tant qu’engagement militant, trouve une partie de ses racines dans la Révolution française, qui introduit dans l’ordre des faits la coupure historique et rend possible le passage de l’utopie à l’action, pour construire un monde nouveau, harmonieux et fraternel. La révolution française devient un paradigme dont s’inspirent par la suite les révolutions suivantes. Karl Marx écrit par la suite que le socialisme allemand a pour lui la force de la théorie, et le socialisme français la tradition révolutionnaire. L’historien Michel Winock estime que c’est grâce à la révolution que le socialisme ’’devient pensable’’. »

Le beau soleil de l’unité

Le Parti socialiste français s’est créé en 1902, par la fusion des Socialistes indépendants, de la Fédération des Travailleurs socialistes de France et du Parti ouvrier socialiste révolutionnaire. Ce n’est qu’en avril 1905, lors du congrès du Globe, qu’est réalisée l’union de la majorité des socialistes français, réclamée par l’Internationale, au sein de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO). Jaurès salue à cette occasion le « beau soleil de l’unité ». Dès lors, de nouveaux progrès humains deviennent possible, comme en décembre 1905, lorsque Jean Jaurès et Aristide Briand obtiennent le vote de la loi de séparation des Églises et de l’État !

En 1904, Jaurès fonde L’Humanité, qu’il dirige jusqu’à son assassinat, le 31 juillet 1914. L’équipe de journalistes et d’intellectuels (dont Anatole France, Octave Mirbeau, Jules Renard…) qui lance le journal a vécu, aux côtés du député socialiste du Tarn, trois combats victorieux : le droit ouvrier à la politique, qui était bafoué, à Carmaux, par le marquis de Solages, et qui s’impose en 1892 ; la justice rendue au capitaine Dreyfus ; la liberté de conscience qui sera inscrite dans la loi de séparation des Églises et de l’État.

Jean Jaurès sous-titre son journal « Quotidien socialiste » et l’utilise, avec quel succès !, pour accélérer l’unité socialiste.

Juin 2022 !

Pour moi, la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes) est le nouveau lever du « beau soleil de l’unité », la lumière de tous les socialismes enfin rassemblés : l’éco-socialisme fondateur du Parti de gauche, germe de la France insoumise (LFI) et de l’Union populaire ; la social-écologie du Parti socialiste, depuis 2010, et d’Europe Ecologie les Verts (EELV) ; le socialisme originel du Parti communiste français (PCF) ; l’alternative écologique, sociale et démocratique de Génération.s !

Notre ordre du jour fondamental est clair et net. C’est « l’harmonie des êtres humains entre eux et avec la nature » ! Notre profession de foi et comme un écho de celle de Jaurès, en 1906, qui espérait « l’avènement d’une société plus harmonieuse et plus juste ».

Cet espoir est plus vif que jamais !

Il est l’invincible espoir du socialisme, dans sa dimension la plus vaste, la plus authentique, dans sa vocation universelle !

Oui, j’inscris la Nupes dans l’héritage perpétuel de l’invincible espoir socialiste, l’invincible espoir de Jean Jaurès et de Léon Blum, les figures tutélaires de mon engagement !

Et puisque c’est une belle tradition, qui a ses lettres de noblesse, je conclue cette profession de foi socialiste par la citation de ces paroles prophétiques :

« Oui, les hommes qui ont confiance en l’homme (…) affirment, avec une certitude qui ne fléchit pas, qu’il vaut la peine de penser et d’agir, que l’effort humain vers la clarté et le droit n’est jamais perdu. (…) Et ils affirment, avec une certitude qui ne fléchit pas, qu’il vaut la peine de penser et d’agir, que l’effort humain vers la clarté et le droit n’est jamais perdu. L’histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir. L’Histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements, mais elle justifie l’invincible espoir. »

Discours de Jean Jaurès à la jeunesse, prononcée au lycée d’Albi (Tarn), le 30 juillet 1903[1].

« L’homme n’a pas deux âmes différentes, l’une pour chanter et pour chercher, l’autre pour agir ; l’une pour sentir la beauté et comprendre la vérité, l’autre pour sentir la fraternité et comprendre la justice. Quiconque envisage cette perspective se sent animé d’un invincible espoir. Que l’homme contemple le but, qu’il se fie à son destin, qu’il ne craigne pas d’user sa force. Quand l’homme se trouble et se décourage, il n’a qu’à penser à l’Humanité. »

Dernières lignes du livre testament de Léon Blum, A l’échelle humaine, écrites en 1944, à Buchenwald, dans une situation désespérée[2].

Antoine Peillon


[1] Jean Jaurès, Rallumer tous les soleils, Textes choisis et présentés par Jean-Pierre Rioux, Omnibus, 2006, « Discours à la jeunesse, 1903 », pp. 533 à 544, ici p. 534.

[2] Léon Blum, A l’échelle humaine, Gallimard, 1945 ; et avec une présentation de Milo Lévy-Bruhl, Le Bord de L’eau, 2021, p. 230.