Par Aurore Lagneau, conseillère régionale Bourgogne-Franche-Comté
Génération Écologie, Groupe Écologistes & solidaires

Dernièrement, la France a intensifié ses actions pour lutter contre l’antibiorésistance, une menace grandissante pour la santé publique, à l’échelle mondiale, qui se caractérise par la capacité des bactéries à développer une résistance aux antibiotiques, compromettant ainsi l’efficacité des traitements conventionnels.

Musée sciences biologiques Dr Mérieux (université de Lyon)

Depuis janvier 2020, la France a instauré le Programme prioritaire de recherche (PPR) contre l’antibiorésistance, doté de 40 millions d’euros sur dix ans et piloté par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), dans le cadre de l’approche « One Health » qui intègre les dimensions humaines, animales et environnementales de la santé, pour une stratégie globale et coordonnée.

En septembre 2024, une nouvelle feuille de route décennale interministérielle a été validée, structurée autour de cinq volets : la sensibilisation, la formation et la communication ; la promotion de l’usage approprié des antibiotiques ; la stimulation de la recherche et de l’innovation ; l’amélioration du système de surveillance ; le renforcement de la collaboration internationale.

Au cours du premier semestre de l’année 2024, la France a enregistré une hausse notable des cas de coqueluche, totalisant 5 616 cas confirmés par PCR entre janvier et mai, mettant en cause une souche de Bordetella pertussis résistante aux macrolides. Cet épisode démontre qu’une surveillance rigoureuse est indispensable pour détecter et prévenir l’émergence de nouvelles résistances.

Par ailleurs, cette résistance médicamenteuse ne se restreint pas au secteur médical. Elle pose aussi des questions d’ordre écologique, car les antibiotiques résiduels provenant des activités humaines, comme les effluents d’eaux usées traitées et les épandages de boues des stations de traitement des eaux, contaminent les écosystèmes naturels, entraînant ainsi la propagation de bactéries résistantes dans l’environnement. 

Ajoutons à cela la présence de biocides et de résidus de métaux dans notre écosystème, ce qui accélère encore l’apparition de ces phénomènes de résistance, avec des conséquences écologiques significatives. Par exemple, des études ont révélé que les oiseaux vivant à proximité des zones urbaines présentent une probabilité plus élevée de porter des bactéries résistantes aux antibiotiques, ce qui laisse supposer une possible transmission entre les êtres humains, les animaux et les écosystèmes.

Au-delà de ces aspects, c’est une véritable responsabilité intergénérationnelle qui se dessine. Les choix que nous faisons aujourd’hui, en termes d’utilisation des antibiotiques (comme en médecine, ou encore en agriculture…) détermineront leur efficacité pour les générations suivantes.

En 2024, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a actualisé l’inventaire des pathologies infectieuses de première importance, incluant notamment les fièvres hémorragiques, les infections virales des voies respiratoires, les infections à arbovirus et les infections bactériennes multirésistantes. Cette classification oriente les activités de surveillance et de recherche, et la France s’efforce d’améliorer ses dispositifs de surveillance épidémiologique et de riposte aux épidémies, en collaboration avec le réseau PROMISE établi en 2021.

Actuellement, la problématique de la résistance aux antibiotiques persiste dans le domaine de la santé publique. Les initiatives nationales se concentrent principalement sur la recherche, la surveillance, ainsi que sur le développement de stratégies de prévention et de traitement. 

Dans ce contexte, l’approche « One Health » fournit un cadre significatif pour favoriser une collaboration interdisciplinaire. Cependant, la réussite de ce projet requiert une coordination et une sensibilisation renforcées de toutes les parties prenantes. Intégrer des perspectives égalitaires entre le vivant humain et non-humain dans les décisions aiderait à développer des stratégies inclusives et respectueuses des interactions entre tous les écosystèmes.

Sources :

Feuille de route 2024 – 2034 | Prévention et réduction de l’antibiorésistance, lutte contre la résistance aux antimicrobiens

One Health, une seule santé (Inrae)

PROMISE – Méta-réseau One Health de lutte contre l’antibiorésistance en France

Les oiseaux proches des milieux urbains touchés par des bactéries résistantes aux antibiotiques (Le Monde, 13 août 2024)